Le corps humain est une formidable machine, mais avec bien des controverses. En effet, il peut se détruire (cancer, maladie auto-immune...) mais aussi, et surtout, il peut se GUERIR SEUL. Je me suis penchée très longuement sur la cicatrisation, véritable garage à réparations en tout genre, le Feu Vert du corps humain! C'est un sujet passionnant.
La cicatrisation d'une plaie est un phénomène biologique naturel. Les tissus humains et animaux sont capables de réparer des lésions localisées par des processus de réparation et de régénération qui leur sont propre.
Cette capacité reste cependant soumise à de nombreuses variations: la rapidité et la qualité de la cicatrisation d'une plaie dépendent de l'état général de l'organisme atteint, qui conditionne sa force de résistance plus ou moins prononcée, de l'étiologie de la lésion, de l'état et de la localisation de la plaie, ainsi que la survenue ou l'absence d'infection.
De ce fait, le traitement et les soins d'une plaie ne seront jamais les mêmes d'une personne à l'autre. Même en présence de lésions d'étiologie identique, le processus de cicatrisation pourra se dérouler de façon totalement différente d'une sujet à l'autre.
LES DIFFERENTES PHASES:
1: La réaction inflammatoire
Quelque soit le type de plaie, la cicatrisation commence toujours par l'apparition de phénomènes inflammatoires précoces. Immédiatement après le traumatisme, on observe un oedème des tissus. La coagulation est induite par l'activation de la thrombokinase (enzyme sécrétée par les plaquettes du sang. Elle aide à la coagulation sanguine en transformant la prothrombine en thrombine). Il en résulte la formation de fibrine.
La fibrine, on en parle à tout va, mais qu'est-ce que c'est??? C'est une protéine fabriquée par le foie. Lors d'une plaie, l'organisme lutte contre la perte de sang en activant la thrombine qui va elle-même stimuler le fibrinogène. Il en résulte la fibrine, dont le but est d'accoler les monomères (les morceaux, pour parler plus simplement...) entre eux. Il se forme alors une sorte de bouchon qui stoppe le saignement: c'est l'obturation de la plaie.
Quelques minutes plus tard débute l'exsudation (rien à voir avec le fait de suer abondamment...). L'exsudation va assurer la défense contre les infections et la détersion de la plaie. Les plaquettes sont enfermées dans ce caillot, libèrent des facteurs de croissance au niveau du site de la blessure et attirent les cellules inflammatoires. Les premières cellules inflammatoires qui arrivent sur le site sont les granulocytes. Ils vont détruire les micro-organismes qui ont envahi la plaie, dégrader les tissus nécrotiques et synthétiser des cytokines inflammatoires, notamment les interleukines (ILK) et le facteur de nécrose tumorale (FNT). Mais attention! Les tissus environnants pourront également être sévèrement lésés. Il est important de contrôler ce processus!
Puis c'est au tour des monocytes et des macrophages d'intervenir. Ils vont orchestrer les étapes de réparation des tissus en phagocytant les tissus nécrotiques, corps étrangers et bactéries et en stimulant la croissance des nouveaux vaisseaux, la croissance des fibroblastes et la prolifération des kératinocytes.
Ainsi par phagocytose et protéolyse, tissus nécrosés et autres débris tissulaires, germes et toxines sont éliminés.
Enfin, par rétrocontrôle sous l'action des cytokines anti-inflammatoires, l'inflammation s'interrompt d'elle-même.
A la fin de cette phase, tandis que la détersion de la plaie se poursuit, les fibroblastes se multiplient sous l'impulsion des macrophages puis sont activés et commencent à produire une matrice cicatricielle extracellulaire.
2: La détersion de la plaie.
La phase de détersion est une étape fondamentale et déterminante dans la prise en charge des plaies. Elle a pour but de faciliter la cicatrisation. Elle permet aussi d'évaluer la profondeur de la plaie. C'est donc à ce stade que tissus nécrotiques et fibrine devront être éliminés. En effet, plaies nécrotiques et fibrineuses sont sources de retard de cicatrisation.
C'est aussi à ce stade que le risque infectieux est maximal. Il doit être totalement éliminé.
Enfin, c'est à ce stade que les exsudats devront être parfaitement contrôlés. En effet, plaies chroniques et/ou difficiles présentent des exsudats riches en métalloprotéases matricielles, capables de dégrader tous les composants de la matrice extracellulaire y compris les facteurs de croissance, freinant ainsi la cicatrisation.
Objectif ultime: favoriser le bourgeonnement. La détersion de la plaie doit être complète et la phase de détersion doit être la plus courte possible. Dans les cas de plaies chroniques, la rapidité et l'efficacité de la détersion varient avec les conditions physiopathologiques de la plaie.
En pratique, la méthode la plus courante de détersion locale du foyer de la plaie est le débridement chirurgical, détersion mécanique au lit du patient et/ou associée à la détersion autolytique à l'aide de pansements humides. L'objectif du traitement est de débarrasser rapidement la plaie de tout tissu nécrotique et fibrineux afin de laisser place à la croissance du tissu de granulation et d'épidermisation.
Attention: l'utilisation d'antibiotiques locaux ou d'antiseptiques est à proscrire, car ils freinent la régénération tissulaire.
La détersion autolytique par pansements humides est très souvent utilisée à domicile. En effet, ces pansements permettent non seulement de maintenir le milieu humide favorisant ainsi l'action des macrophages et des polynucléaires vis-à-vis des tissus nécrotiques, mais également d'absorber débris tissulaires, germes et toxines. Ils jouent un rôle essentiel dans la préparation et l'épithélialisation de la plaie.
3: Formation du tissu de granulation
Granulation: agglomération, réduction en petits grains.
Le tissu de granulation est un tissu transitoire riche en vaisseaux et en cellules et représente le début d'une organisation conjonctive. Il commence à se former au cours des dernières phases de l'inflammation. Son rôle est de combler la perte de substance tissulaire.
Sa durée de formation dépend, bien sûr, de l'ampleur de la perte tissulaire. Plusieurs jours pour les plaies chirurgicales propres, quelques semaines pour les brûlures étendues du 3ème degré et les escarres profonds de décubitus.
Tout d'abord, les fibroblastes se divisent et synthétisent des mucopolysaccharides (protéoglycanes, fibronectine) qui serviront de matrice à l'élaboration des fibres collagènes du tissu conjonctif.
(Fibroblastes: superbes cellules en forme de fusée ou d'étoile. Elles ont la capacité de proliférer en se multipliant. Les fibrocytes sont les mêmes cellules arrivées à maturité. Le rôle des fibroblastes est de réparer les lésions dues à un traumatisme. En cas d'inflammation, elles ont un rôle réparateur. Devenant mobiles, elles se contractent, formant les myofibroblastes qui favorisent le processus de cicatrisation des plaies.)
Un peu de biologie cellulaire (je comprendrai si tu sautes cette partie!): La synthèse du collagène se fait dans les fibroblastes à partir du procollagène soluble. Les fibres d'abord reliées en spirales se séparent, puis vont s'accoler à l'extérieur des fibroblastes. Sous l'influence de la vitamine C (d'où l'importance de manger des oranges...), de l'oxygène et du fer (pour le fer, mangez du boudin), ces fibres collagènes, au début isolées, se renforcent et s'assemblent en faisceaux qui pourront répondre dans l'avenir aux contraintes de traction. Ainsi se constitue la fibre collagène définitive et insoluble, qui sera incorporée dans la matrice mucopolysaccharide. Ces fibres combleront définitivement le tissu lésé. L'élastine confère l'élasticité au tissu.
Dans le même temps, des néocapillaires vont progresser dans cette matrice pour assurer la nutrition du tissu nouvellement formé. En présence de pertes de substance plus importantes, les capillaires se présentent à la surface de la plaie avec un aspect rouge vif (tissu de granulation néoformé).
A la surface du tissu néoformé apparaît une couche de sécrétions fibrineuses dans laquelle vont pénétrer des bourgeons vasculaires et des cellules du tissu conjonctif. Ces deux éléments vont à leur tour produire une nouvelle couche de sécrétions. Par ce mécanisme, ils vont faire progresser lentement le bourgeonnement et ainsi combler progressivement la plaie.
Juste après la détersion, le bourgeon charnu est un tissu conjonctif jeune, oedémateux, pauvre en collagène et en vaisseaux, riche en fibroblastes et en cellules inflammatoires. Progressivement, ce tissu s'appauvrit en cellules inflammatoires et s'enrichit en collagène et en vaisseaux. Le réseau des capillaires au départ indifférencié devient moins dense et forme progressivement un réseau proche de la normale, hiérarchisé en artérioles, capillaires et veinules post-capillaires.
Parallèlement, le bourgeon charnu (propriétés contractiles des myofibroblastes) se contracte. Au terme de ce processus, un tissu fibrineux dense cicatriciel s'est constitué et peut se remodeler.
4: L'épithélialisation
L'épithélialisation marque le fin de la cicatrisation (fermeture de la plaie). Elle résulte de la néoformation par mitose des kératinocytes (cellules de la peau) des berges de la plaie et de leur migration sur la surface de la plaie.
A cette étape, les fibres de collagène commencent leur maturation. Leur orientation se modifie, elles tendent à se disposer selon les lignes de plus forte tension comme dans le tissu conjonctif normal. Sous l'influence des myofibroblastes ou fibroblastes activés, la plaie se rétracte. En s'appauvrissant progressivement en eau et en contenant de moins en moins de vaisseaux, le tissu de granulation devient plus ferme. Fibroblastes, myofibroblastes et cellules vasculaires meurent par apoptose (l'apoptose est un processus par lequel des cellules déclenchent leur auto-destruction). Le tissu de granulation se transforme progressivement en tissu cicatriciel qui, à son tour, favorisera la réaction cicatricielle.
Lorsque l'épithélium a migré au centre de la plaie, la fonction de barrière de la peau est restaurée en grande partie. Les pertes liquidiennes sont alors minimales, les micro-organismes ne peuvent plus envahir la plaie.
La fermeture de la plaie est suivie d'une étape de remodelage qui peut durer 6 à 9 mois.